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Sentiment d’inutilité au travail : causes et solutions pour y faire face

Un salarié sur trois estime que son poste pourrait disparaître sans conséquence majeure, selon une enquête menée en France en 2023. Ce ressenti touche autant les grandes entreprises que les structures plus modestes, indépendamment du secteur d’activité.

L’absentéisme, le désengagement et la difficulté à recruter s’accentuent dans les organisations où ce phénomène progresse. Face à ce constat, certaines entreprises expérimentent de nouvelles approches pour raviver la motivation et renforcer l’utilité perçue des missions confiées.

Pourquoi le sentiment d’inutilité s’installe-t-il au travail ?

Le sentiment d’inutilité au travail s’infiltre par de multiples failles. Le concept de bullshit jobs, imaginé par l’anthropologue David Graeber, met le doigt sur ce syndrome bien réel : des postes dont l’impact paraît dérisoire, au sein de structures où la finalité du travail échappe à celles et ceux qui agissent au quotidien.

Voici deux facteurs qui alimentent ce mal-être :

  • Des tâches perçues comme sans portée concrète, qui peinent à montrer leur utilité pour l’entreprise ou la société.
  • La dissonance entre valeurs personnelles et valeurs de l’entreprise, qui accentue le sentiment d’être à contre-courant.

Quand les ambitions personnelles se heurtent à la réalité d’une organisation rigide, le malaise s’installe, et la perte de sens devient inévitable.

De ce décalage naissent plusieurs formes d’épuisement professionnel. Le brown-out incarne une lassitude profonde, fruit du manque de sens, d’un déficit de reconnaissance et d’une avalanche de procédures inutiles. À force de multiplier les circuits d’approbation, de rogner l’autonomie, ou de fermer la porte aux évolutions, l’organisation finit par épuiser ses propres forces vives.

À l’inverse, le bore-out s’installe là où l’ennui est roi : trop peu de tâches stimulantes, des compétences sous-exploitées, parfois jusqu’à l’impression d’être mis à l’écart.

  • Brown-out : perte de sens, décalage de valeurs, bureaucratie pesante.
  • Bore-out : ennui, absence de stimulation, répétition sans intérêt.
  • Burn-out : surcharge, fatigue physique et morale.

La reconnaissance et l’autonomie demeurent de puissants leviers. Là où la machine administrative prend le dessus, la motivation décroît. Plus personne ne voit à quoi sert son travail : la confiance s’étiole, l’engagement vacille.

Perte de sens : comment la reconnaître et comprendre ses conséquences au quotidien

La perte de sens au travail ne se repère pas sur un organigramme. Elle s’insinue dans la routine, mine la motivation et grignote la confiance. Plusieurs signaux ne trompent pas :

  • Un décrochage progressif, où l’enthousiasme s’érode lentement,
  • une lassitude persistante qui s’installe malgré les efforts,
  • une disparition de l’intérêt pour les tâches quotidiennes.

L’envie s’évapore. Le salarié ne se reconnaît plus dans ses missions. Les valeurs affichées par l’entreprise semblent lointaines, parfois même étrangères. Petit à petit, la question du « pourquoi » prend le pas sur celle du « comment ».

Individuellement, ce désalignement a des conséquences directes. Le désengagement s’installe, la frustration devient un compagnon de route. Le bore-out rime avec perte d’estime de soi, tandis que le burn-out pousse à bout, jusqu’à l’épuisement. Certains restent présents physiquement mais décrochent mentalement, phénomène qu’on appelle le présentéisme. D’autres s’isolent ou finissent par s’absenter pour préserver ce qu’il reste de leur équilibre.

L’impact ne s’arrête pas à la sphère individuelle. Les conséquences sur la santé mentale sont tangibles : stress chronique, anxiété, voire dépression. Les risques psychosociaux deviennent le quotidien de nombreux collectifs. Les équipes se grippent, la qualité de vie au travail s’effondre. La perte de sens ne fait pas de bruit, mais ses effets, eux, se propagent.

Groupe de collègues en réunion avec un collègue isolé

Des pistes concrètes pour retrouver motivation et fierté dans son job

Redonner du sens au travail dépend d’actions ciblées, pas d’incantations. D’abord, il s’agit de clarifier la mission. Trop souvent, les salariés avancent sans savoir à quoi servent vraiment leurs efforts. Managers, soyez explicites : donnez du relief aux objectifs, reliez chaque tâche à l’utilité commune. Là où le brown-out menace, un cap lisible restaure la boussole.

Ensuite, la reconnaissance fait basculer l’atmosphère. Un mot, un geste, un retour constructif : l’effet est immédiat sur la motivation. Les perspectives d’évolution ouvrent de nouvelles voies : mobilité interne, formation, bilan de compétences… autant d’options pour sortir d’un quotidien qui tourne à vide.

Du côté des salariés, l’outil de l’ikigai, ce croisement japonais entre compétences, envies et utilité, peut servir de boussole. Repérez le point de rencontre entre vos talents et les besoins de votre structure. N’hésitez pas à demander, à proposer, à redéfinir votre périmètre de mission.

Dans les organisations qui misent sur l’autonomie et la confiance, le bore-out recule nettement. Clarifier le fonctionnement, alléger la bureaucratie, encourager les initiatives : ces leviers font la différence. Les solutions ne manquent pas, à condition d’oser les mettre en mouvement.

Rallumer la flamme du sens au travail n’est ni un rêve ni une formule magique. C’est une dynamique, faite de remises en question, de dialogue et d’audace. À chacun, entreprise comme salarié, d’oser remettre du relief dans la routine, pour éviter que le quotidien ne se vide de sa substance.